Cahier de doléances de Saint-Gravé
En ce jour de 14 juillet, il est bon de rappeler que les communes du pays ont aussi participer à la révolution, ici est reproduit le Cahier de doléances de Saint-Gravé.
Qu’est ce qu’un cahier de doléances ?
Dans la France de l’Ancien Régime, les cahiers de doléances sont les registres dans lesquels les assemblées notent vœux et demandes. Dans ces recueils sont consignées les représentations et protestations adressées au roi par les états généraux ou provinciaux.
Cahier de Saint-Gravé
1789, [5 avril]1. – Saint-Gravé
Cahier de doléances du Tiers-État de la paroisse de Saint-Gravé2.
AD56, B 3669
[En marge haute, à gauche : « Saint-Gravé. Vu et passé [paraphe] »]
Cahier des demendes faites aux États généraux par les habitans roturiers de la paroisse de Saint-Gravé.
Le Tiers-État de la paroisse de Saint-Gravé demende :
1° que la liberté individuelle sera garantie à tous les François ;
2° que le retour périodique des États généraux soit fixé par une loi précise et que les impôts ne soient consentis que d’une tenue à l’autre ;
3° que dans les États généraux on opinera par tête et non par ordre ;
4° que les impôts consentis par les États généraux seront générallement et égallement répartis sur les citoyens de tous les ordres, à l’effet de quoi tous les impôts distinctifs à chaque ordre seront suprimés, notament les droits de franc-fief ;
5° qu’il sera rédigé un nouveau tarif des droits de controlles et d’3insinuation dans lesquel il n’y aura rien d’arbitraire ;
6° qu’il sera fait un fond suffisant pour l’abolition de la corvée sur les grandes routes et pour l’achapt des miliciens, lequel fond sera levé par une contribution égalle et proportionelle sur tous les ordres et sur toutes les personnes, habitans des villes et des campagnes sans distinction ;
7° que tout droit de propriété sera inviolable et que nul ne puisse en être privé, même à raison d’intérêt public, qu’il n’en soit dédommagé au plus haut prix et sans délais ; //
8e que la noblesse par charge sera dès à présent supprimée dans tout le royaume ;
9° que les abbays seront mises en économat à fur et à mesure qu’elles viendront à vaquer et que les revenus desdites abbays seront emploiés annuellement à payer les dettes du clergé en principaux et intérêts ;
10e arrêté que sa majesté sera instament suppliée de supprimer les pensions excessives qu’elle a pu accorder et de n’en donner à l’avenir qu’aux personnes qui n’auront pas moyen de subsister honnêtement sans pension, relativement à leurs qualités et aux services réelles et non supposés rendus à l’État ;
11e arresté que les députés de la sénéchaussée de Ploërmel aux États généraux se réuniront au clergé de l’évesché de Vannes pour demender la suppression du droit d’annat que les chanoines de l’église cathédralle de Vannes sont en posession de prélever sur les cures du même évesché ;
1 La date n’étant pas indiquée dans le cahier de doléances, elle est restituée à partir de la date du procès-verbal d’élection des représentants de la paroisse aux États généraux.
2 Le document est folioté et signé « Briend » en haut de chacun des deux folios, à gauche.
3 « d’ » ajouté en interligne.
12° que sa majesté sera suppliée de supprimer4 une infinité de gouvernemens et de places militaires qui ne sont d’acune utilité dans l’État ;
13° que ses vasseaux seront déchargés de l’obligation de voiturer les matériaux emploiés à faire les réparations des moulins nonobstant tous arrêts contraires ;
14° qu’il ne sera payé à l’avenir aucuns droits de lods et ventes sur les échanges en Bretagne attendu que le droit de lods et ventes sur les échanges fut affranchi en 1700 des deniers communs de la province. //
15e qu’il sera fait une loi fixe et invariable sur la propriété et l’usage des terres appellées « communs » sittuées dans la province de Bretagne.
Toutes les demendes cy-dessus ont été arrestés dans l’assemblée généralle des habitans roturiers de la paroisse de Saint-Gravé sous les seings de ceux qui scavent signer.
Représentent de plus lesdits habitans qu’ils sont écrasés par les rentes seigneurialles, par les dixmes des seigneurs, par les corvées et charois de sorte que, les impositions royalles et redevances seigneurialles acquitées, il leurs reste à peine le quart de leurs revenus pour leur subsistance.
Lesdits habitans sont d’ailleurs obligés de conduire les bagages des troupes. Plusieurs paroisses dans la province n’y sont point assujetties. Il est juste que celles qui ne conduisent point les troupes indemnisent les autres. Il est égallement juste que les meules à bras soient permises dans la province sans payer pour cet object aucune redevance. Et qu’il soit permis de tuer les pigeons, qui coûtent presque autant que la dixme.
Toutes les demendes cy-dessus ont été arrestées dans l’assemblée des habitans roturiers de laditte paroisse sous les seings de ceux qui savent signer.
[Signé :]
G. Dufraiche. Jan Hallier.
Pierre Yvet. Pierre Robein. Olliviere Le Boregne
F. Guillaume. Pierre Dugué
Salomon Plormel. J. Hmeri. Ledu
Pierre Hallier. G. Bellavoir. Guillaume Quiban.
Jo. Diguet. J. Piogé. Jullien Lemoine
Caudar. Gentien Hallier //
Cotté et paraphé par première et dernière page par nous Jean-François-Noël Briend, substitut du procureur fiscal. Ne varietur6.
[Signé :]
Briend